Nous délibérons ce soir sur une convention portant sur la mise à disposition par une société privée d’abris de bus et d’un système de jalonnement des parkings.

Cette convention est le renouvellement d’un contrat largement décrié à l’époque, passé il y a 15 ans avec la société Decaux.

Reconnaissons avant tout que le Cahier des Charges de la Convention telle qu’aujourd’hui rédigé a largement gagné en qualité sur le plan des droits et devoirs de chacune des parties. Ainsi, la ville se concentre sur le seul mobilier urbain capable de fournir un espace de publicité, à savoir les abris bus. Au moins, les choses sont claires.

Mais pour les écologistes ce nouveau Cahier des Charges reste très problématique, et cela d’abord dans ses principes fondamentaux. Ce texte cache en effet deux options que nous jugeons inacceptables : à savoir le financement privé de la ville d’une part, d’une part et le financement public d’un service privé, d’autre part.

  1. Il met en place en effet de manière insidieuse un système de financement du budget de la ville par la publicité. En effet, le collège attend du prestataire qu’il place et entretienne des abris bus mais en plus, par une compensation financière annuelle, qu’il remplisse les caisses de la ville au travers de l’affichage publicitaire. De ce fait et le fait est grave – on admet que le budget de la ville dépende de la publicité !

  2. Il établit aussi une route des parkings qui serait payée par les revenus de la publicité sur le domaine public. C’est choquant. Pourquoi serait-ce le domaine public qui devrait payer pour un service dont les premiers bénéficiaires, les opérateurs de parking privés, n’allongent pas un euro ?

  3. Le cahier des charges vise plus la manière dont les abris bus rapportent de l’argent que sur leur usage : protéger les citoyens des intempéries qui attendent le transport en commun. Ainsi, pas un mot sur la volonté d’étendre le nombre d’abris de bus. Au contraire, on réduit leur nombre au profit de panneaux publicitaires électroniques.

Ecolo refuse ces principes qui sont cachés dans la rédaction du Cahier des Charges : l’opération doit viser à offrir un meilleur service public demain qu’hier, il doit être neutre pour les finances communales et en aucun cas ne faire dépendre le public du privé ou l’inverse. Le pragmatisme ne doit pas empêcher d’être vigilant sur ces principes fondamentaux qu’Ecolo rappelle avec force.

Mais il n’y a pas que cette question des principes inavoués de ce texte. Le Cahier des charges manque aussi de principes éthiques.

Nous pensons chez Ecolo que la publicité dans l’espace public est devenue bien trop envahissante et véhicule des messages qui vont à l’encontre des valeurs que portent le service public et la collectivité. En particulier, pour les plus jeunes. Il va de la mission de service public communal de préserver ces publics. Ecolo demande qu’une réflexion soit menée sur des zones, par exemple à proximité immédiate des écoles, qui devraient être indemnes de publicité sur ces mobiliers urbains. Ce qui a été imposé avec succès à des chaines de télévision qui ne peuvent diffuser de publicité devant des programmes à destination des enfants, ne serait pas inconvenant ni idéaliste dans un contexte urbain.

Faute dans les principes qui la guident, oubli des principes éthiques – ce Cahier des Charges doit être revu autour de deux idées : la première est que la ville n’a ni à investir pour les opérateurs privés, ni à dépendre du revenu que ceux-ci tirent de la publicité ; la seconde est d’établir des zones sans publicité.

On arguera du fait que la publicité sur les abris bus rapporte beaucoup. Effectivement, si on est d’accord sur les principes qui doivent guider l’action publique, à savoir le retrait progressif de la publicité, Ecolo a déjà proposé que de manière transitoire, au lieu d’une compensation domaniale pour usage exclusif, la taxe sur les panneaux publicitaires soit augmentée. En passant de 72 euros à 144 euros par m2 par an : on couvrira sans problème le montant de la compensation envisagée. Ainsi, les choses seront plus claires et les opérateurs paieront pour ce qu’ils veulent : l’usage d’un espace publicitaire sur la voie publique. Ecolo propose donc très concrètement que le conseil élabore un plan de sortie de dépendance à la publicité via la concession domaniale, et taxe d’avantage la publicité.

Ecolo demande également que le texte soit amendé en imposant des zones sans publicité autour des écoles dans un rayon de 100 mètres ainsi que devant d’autres endroits à déterminer où la population la plus fragile serait trop exposée au matraquage publicitaire. Nous déposons à ce sujet 5 amendements précis.

En conclusion, il est temps que la ville redevienne maître de ses outils de financement et qu’elle garantisse un espace public délesté d’espaces publicitaires qui ne servent ni le paysage, ni les gens. En 15 ans, on peut facilement entrer dans cette nouvelle ère du no pub. Pour autant que l’on s’en donne les moyens politiques. C’est pourquoi nous ne voterons pas en faveur de ce cahier des charges.

Bénédicte Heindrichs

 

 

Amendements que nous avons malgré tout proposés et qui ont été malheureusement rejetés par la majorité :

  • L’extension de zones sans publicité autour des écoles et des hôpitaux dans un rayon de 100 mètres à convertir en nombre d’abris bus,

  • Le calcul fin du nombre de lieux d’affichages qui peuvent être éliminés du seul fait du progrès technologique : aujourd’hui, on peut mettre 3 panneaux de pub déroulant là où avant on devait envoyer une camionnette changer l’affiche toutes les semaines. Cela vaut à notre sens plus que les 10% de réduction de lieux annoncés,

  • Le retrait du cahier des charges des 20 panneaux électroniques qui font défiler des publicités avec le son en prime. C’est une hérésie tant du point de vue financier défendu par la ville puisque là ce ne sont pas 3 mais 10 ou 15 publicités qui pourront défiler sur le même panneau, que du point de vue du développement durable et de la santé des gens. En effet, ces panneaux ont une dépense énergétique importante. Comment justifier ce surplus, qui ne fait pas partie de besoins prioritaires en énergie, pour la Ville alors que, lors de la COP21, Liège s’est engagée à réduire son empreinte écologique ? Par ailleurs, les politiques de santé insistent pour limiter l’exposition aux écrans, en particulier des enfants et des adolescents. Quelle logique y a-t-il à en ajouter dans l’espace public ?

  • Le retrait de l’engagement de la Ville de prendre en charge, en tout ou en partie, la réparation des bris de vitre sur les panneaux publicitaires (art. 2.4.4).

  • Le CSC prévoit l’interdiction de la publicité à caractère raciste ou xhénophobe (art. 2.3.1). Nous insistons sur l’importance de faire respecter cette disposition, et proposons de l’étendre aux discours et images à caractère sexiste, régulièrement présents dans le monde publicitaire.