Cette année, c’est noël en avance pour les cyclistes à Liège. L’échevin de la mobilité et du budget a déposé sous le sapin 3 projets exemplaires en matière de mobilité cyclable : la création de 2 véritables corridors vélos : l’un entre le pont Kennedy et la place du XX aout (200.000€) l’autre, en rive droite, entre Grivegnée et Jupille (180.000€). Un troisième projet, fruit d’un subside Wallon cette fois, verra également le jour et permettra de relier la nouvelle passerelle Vivegnis à la gare d’Herstal (200.000€). Un budget total de 580.000€.

Une vraiment bonne nouvelle pour tous les liégeois, car, comme on le dit depuis longtemps, ce qui bénéficie au vélo bénéficie à toutes et tous : diminution de la congestion automobile, qualité de l’air, nuisance sonore, qualité de vie, …

Nous nous réjouissons donc de cet engouement du collège pour le vélo, poussé dans le dos par les citoyens qui ont soutenu massivement les propositions en faveur de la mobilité douce sur la plateforme réinventons liège. Ceci dit, nous déplorons que ce revirement arrive seulement maintenant, à un an des élections. Qu’est-ce qu’on aurait pu réaliser si ça avait été à effort constant depuis le début de la législature, d’autant plus que nous étions soutenu par le programme Wallonie Cyclable, grâce auquel nous avons perçu 800.000€ pendant 5 ans pour développer la pratique du vélo à Liège. Si la Ville avait pris cet engagement au sérieux, on serait en train d’inaugurer notre 25ème corridor vélo. Au lieu de ça, la majorité y est allée à reculons. Bilan : 67% des aménagements promis n’ont pas été réalisés.

En se penchant dans le détail du budget, on constate que les autres postes vélos diminue. On avait déjà prévenu l’an passé : avec la fin de Wacy, en 2018, la période des vaches maigres pour le vélo démarrera…

En effet, les budgets destinés aux actions de sensibilisation, communication ou de mise à disposition de vélos (location des Vélocités, programme pour les brevets cyclistes à l’école, projet « à vélo mesdames », …) diminue de près d’1/3 (2018 : 116.014 €) tandis que les recettes espérées des locations de vélos doublent (45.000€ au lieu de 23.000€ au compte 2016) ce qui est vraiment très optimiste (et pas très crédible) !

Nous regrettons que la ville n’ait pas anticipé la fin de ce subside afin de pérenniser ces services dans le temps.

Si les sommes allouées aux infrastructures cyclables sont louables, ne nous y trompons pas, la Ville n’a pas renoncé à donner la priorité à la voiture :

– Rappelons l’investissement dans le concept shop & drive pour un montant de 145.000€ qui sera inauguré en 2018 et qui nous coutera 19.000 € d’entretien par an, soit le budget « parking vélo » de réinventons liège pour toute l’année 2018 !

– Un autre investissement : l’affichage dynamique des parkings. L’une des contreparties du contrat avec JC Decaux qui ne figure donc pas dans le budget mais qui représente bien un coût caché pour les liégeois (montant estimé : 160.000 euros + les frais d’entretien).

– Autre dépense non budgétée : la gratuité du parking pendant les fêtes ! Un non-sens total, à l’heure où l’on a crucialement besoin d’organiser la rotation sur les places de parking et de limiter l’entrée des voitures dans le centre…

Ghandi disait « Change en toi ce que tu veux changer autour de toi ». Je me suis donc penchée sur les dépenses liées au parc automobile de la ville. Là non plus, pas de changement de paradigme en vue : 190.000€ (+1000€ par rapport à 2017) pour la location de voitures en leasing (et on ne parle pas de véhicules utilitaires), 52.400€ (+1000€ par rapport à 2017) pour la location d’emplacements de parkings, 835.000€ (+35.000€ par rapport à 2017) de frais de carburant (sachant que les échevins et directeurs généraux disposent d’une voiture de fonction et d’une carte essence).

Total de ces quelques articles : 1,4 millions d’euros. Et c’est sans compter le premier seau de bitume pour rénover les voiries (qui en ont bien besoin, là n’est pas mon propos).

Avec ce budget mobilité, en essayant de faire plaisir à tout le monde le collège finit par ne faire plaisir à personne, car en mobilité, on ne peut pas faire plus de tout ! Il faut une vision et poser des actes courageux.

Alors, la volonté était pourtant déjà là en 2012. Le collège écrivait dans le projet de ville « chaque année, de plus en plus de voitures entrent quotidiennement à Liège (240.000 selon les dernières estimations). Preuve de vitalité́, cet accroissement du nombre de véhicules ne peut se poursuivre indéfiniment. Une ville trop embouteillée, c’est une ville qui voit la qualité́ de vie de ses habitants diminuer et qui perd son attractivité » et d’inscrire dans les 12 projets d’hercule la création de parkings P+R et de deux parkings en centre-ville.

Le groupe Ecolo avait réagi : « En application des bonnes vieilles recettes, la majorité n’avance que sur la création des parkings en centre-ville (Avroy et Cockerill) et va encore plus loin que le projet de Ville puisqu’un 3ème se dessine place de l’Yser. Ces parkings ne font que renforcer les embouteillages et la pollution de la Ville, que la majorité dénonce par ailleurs dans son projet de Ville. On est en plein délire !!! ».

5 ans plus tard, force est de constater que nous avions raison : il n’y a que le parking de délestage de Vottem qui pointe le bout de son nez (et n’aura que peu d’impact pour la vallée). Par contre, deux nouveaux parkings en centre-ville, place de l’Yser, et rue Hors-Château, vont être inaugurés prochainement tandis que le collège nous rappelait encore ce lundi que les parkings Avroy et Cockerill faisaient toujours partie de ses priorités.

Pour conclure, nous constatons que le collège est coincé entre le vieux monde et le nouveau monde. Par exemple, un travail remarquable est réalisé dans le cadre de l’actualisation du plan communal de mobilité – qui prône des principes de mobilité durable, d’intermodalité et de partage équitable de l’espace public – mais nous regrettons que lorsqu’il s’agît d’appliquer les principes sur le terrain, ça se complique : le collège en revient au vieux réflexe du tout à la voiture…. Les Liégeois, eux, sont prêts à basculer du bon côté de la force, il ne leur manque plus que des élus prêts à se mouiller !